Nouvelles

Corps titan (titre de survie)

Par Maxime Prévost-Durand // Le Courrier

Audrey Talbot ne devrait pas pouvoir monter sur scène. C’est même seulement miraculeux qu’elle soit toujours en vie. À travers la pièce documentaire Corps titan (titre de survie), qu’elle a écrite et dans laquelle elle joue son propre rôle, la comédienne replonge au cœur de cet accident qui aurait pu – et même dû – lui coûter la vie le matin du 28 mai 2013 lorsqu’elle a été fauchée par un camion pendant qu’elle circulait à vélo à Montréal.

Aucun détail n’est épargné. Les scènes qui relatent l’accident sont même très graphiques, prévient-elle. Mais tout n’est pas que noirceur. Au contraire. Derrière ce drame ressurgit aussi ce qu’il y a de plus beau dans l’humanité.

« C’est surtout un spectacle d’espoir et de lumière, malgré la dureté de certains passages, souligne-t-elle. L’idée, c’est de voir toute la solidarité et la nécessité des intervenants qui ont croisé ma route – des premiers répondants, au personnel hospitalier et aux thérapeutes – et de mettre en valeur leur travail. »

Audrey Talbot n’a gardé aucun souvenir de l’accident qui aurait pu lui être fatal. Sans grande surprise puisqu’elle a subi un traumatisme crânien sévère. Pendant sept mois, elle a été hospitalisée. Elle a passé 25 jours dans un état critique et deux mois aux soins intensifs. Ce n’est qu’à partir du début de sa réadaptation que sa mémoire s’est remise en marche.

Plus tard, elle a cherché à comprendre ce qui s’était passé ce jour-là et comment elle a pu survivre à cette épreuve épouvantable. Elle a réussi à entrer en contact avec toutes les personnes qui sont intervenues sur les lieux de l’accident et à l’hôpital. Même s’ils ont l’habitude de voir des personnes accidentées, chacun se souvenait distinctement d’Audrey Talbot.

Dans un premier temps, la démarche était purement personnelle, raconte celle qui signe sa première pièce comme autrice. « Mais en ayant autant de détails et d’informations, c’est devenu plus fort que moi, il fallait que je partage mon histoire dans un but d’injecter beaucoup de lumière dans ce long tunnel noir que j’ai traversé et pour me réapproprier qui j’étais. Ça a été très difficile, mais aussi très libérateur. Plus j’y plonge, soir après soir, plus je me sens solide dans cette prise de parole. Je sais à quel point elle fait du sens, non seulement pour moi, mais aussi chez d’autres. J’avais rejoué après l’accident, mais là, d’affirmer clairement sur scène qui je suis… Ça m’a transformé entièrement [cette épreuve]. Je trouve ça le fun de voir à quel point ça fait écho chez les gens. »

Le titre, lui, fait référence aux titans de la mythologie, mais aussi au fait que son corps est maintenant rempli de titane. « Un corps fracassé, mais qui devient un peu indestructible », va-t-elle jusqu’à dire.

La comédienne, qui œuvre dans le milieu du théâtre depuis plus de 20 ans, garde évidemment d’importantes séquelles. « Je ne porterai probablement plus jamais de robes », lance-t-elle en référence à ses jambes « très affectées » qui attirent des regards à la fois surpris, fascinés et choqués dans la rue. Mais le fait qu’elle puisse marcher de nouveau et qu’elle ait regagné son autonomie – ainsi que toute sa tête – relève du miracle. Un miracle qui ne se serait pas produit sans l’intervention efficace des premiers répondants et du personnel hospitalier, répète-t-elle. « C’est un grand hommage que je leur fais finalement. »

La pièce de théâtre Corps Titan (titre de survie) sera présentée le samedi 26 novembre à 20h. Pour plus d'informations, cliquez ici.